Dans le tumulte de Kinshasa, la sagesse ne se trouve pas uniquement dans les amphithéâtres ou les bibliothèques. Elle s’affiche, sans prétention, à l’arrière d’un taxi-bus ou d’un minibus de transport. C’est dans ce décor ordinaire que l’on tombe sur cette phrase poignante : « C’est facile de critiquer, mais difficile de faire mieux. »
Inscrite sobrement en bleu sur une carrosserie jaune, cette sentence dit plus qu’elle ne laisse paraître. Elle renverse une tendance humaine aussi vieille que les sociétés elles-mêmes : le jugement facile. Dans notre quotidien, dans nos familles, au travail, dans la gestion des affaires publiques, dans les réseaux sociaux ou les relations personnelles, nombreux sont ceux qui pointent du doigt… mais rares sont ceux qui construisent.
Une société de juges, mais peu de bâtisseurs
Philosophiquement, ce message renvoie à une vérité de Socrate : « Le vrai savoir est de savoir que l’on ne sait rien. » Critiquer, c’est croire qu’on sait mieux. Agir, c’est admettre qu’on apprend encore. Entre le commentaire et l’action, il y a une frontière invisible mais réelle : la responsabilité.
On ne devient pas un bon dirigeant parce qu’on a dénoncé un mauvais. On ne devient pas un bon parent parce qu’on critique ses propres parents. Ce sont les actes qui révèlent la valeur, pas les mots.
Appliquer cela à notre quotidien
Si chacun appliquait cette pensée dans sa vie : le salarié cesserait de critiquer son patron sans comprendre les enjeux de gestion; le jeune cesserait de moquer les aînés sans connaître le poids de l’expérience; le citoyen, au lieu d’être seulement dans la plainte, s’engagerait à agir, à initier, à proposer.
Même dans nos relations personnelles : combien de couples se détruisent par des critiques incessantes alors que personne ne fait l’effort de « faire mieux » ? Combien d’amitiés s'effritent parce qu'on préfère accuser l'autre sans jamais se remettre en question ?
Une rue, un proverbe, une révolution intérieure
Notre monde moderne est devenu une arène où chacun a une opinion sur tout. L’enseignant est critiqué par les parents. Le médecin par son patient. Le gouvernement par le citoyen. L’artiste par son public. Le patron par ses employés, et vice-versa. Parfois, même avant de comprendre la complexité d’une action, le verdict est déjà prononcé.
Mais poser une critique ne demande ni effort, ni compétence. Ce qui est difficile, c’est faire mieux. Proposer une solution concrète. Prendre les rênes. Être à la place de celui qu’on juge si sévèrement.
Cette phrase ne vise pas uniquement les puissants ou les décideurs. Elle s’adresse à chacun de nous. À l’élève qui critique son professeur, mais ne fait aucun effort pour comprendre. À l’ami qui juge, mais n’offre aucun soutien. À celui qui commente, mais ne s’engage pas. À l’électeur qui exige tout, mais ne respecte aucune règle.
Faire mieux demande plus qu’un regard critique : cela exige du travail, de la vision, de la persévérance et parfois, de l’humilité pour reconnaître que même en essayant, on n’y arrive pas toujours.
Ces écrits de rue, simples mais puissants, devraient être enseignés à l’école, repris dans nos débats publics, gravés dans nos consciences. « C’est facile de critiquer, mais difficile de faire mieux » est bien plus qu’une phrase sur un minibus : c’est un appel à la maturité individuelle et collective.
Et si, au lieu de critiquer le conducteur du bus qui nous ralentit, nous prenions un instant pour nous demander : serais-je capable de faire mieux à sa place ?
F. Mulumba
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