L’Association nationale des victimes du Congo (ANVC) a conclu avec succès sa Journée de réflexion, échanges et restitution au cœur de la capitale, Kinshasa, au collège Boboto, ce vendredi 7 novembre. Cet événement majeur a réuni des victimes, des parlementaires, des juristes et des experts, s'affirmant comme un plaidoyer puissant pour que la mémoire, la justice et la réparation cessent d'être de simples symboles pour devenir des réalités opératoires en République démocratique du Congo.
Dès 08h30, la matinée a été marquée par une cérémonie d’ouverture empreinte de dignité, le président national de l’ANVC insistant sur la nécessité de l’unité et de la réparation effective des préjudices subis par les Congolais.
L'événement s'est articulé autour de quatre thématiques centrales, mobilisant des experts de haut niveau :
1. Reconnaissance politique : le député national Alidos Tshitoko élu du territoire de Dibaya au Kasaï-Central, a éclairé l'auditoire sur la « procédure parlementaire à la reconnaissance du Génocide congolais », insistant sur le rôle déterminant des institutions législatives dans la qualification des crimes de masse.
2. Bilan des violations : Le président de la Commission national des droits de l’Homme (CNDH), Paul Nsapu, a dressé un état des lieux sans concession des «violations graves des droits humains perpétrées dans plusieurs parties du pays », pointant les lacunes et les perspectives pour une meilleure protection.
3. Mise en Œuvre de la Justice Transitionnelle : Le Professeur Serge Makaya, spécialiste en la matière, a présenté des modèles pour la « Justice transitionnelle en RD Congo », proposant la reconnaissance du génocide comme mode de réparation structurel pour les victimes.
4. Fondement Légal : Me. Christel a exposé les « Cris des victimes en droit positif congolais », analysant les instruments juridiques nationaux existants et les défis à surmonter pour traduire la parole des victimes en actions judiciaires concrètes.
Après un panel d’échange et des travaux en carrefour qui ont permis de confronter les expériences et les revendications, l'événement a culminé avec l'adoption vers 14h30 de recommandations claires et fermes. Celles-ci constituent désormais une feuille de route pour la prise en charge des victimes.
Les principaux appels de l'ANVC concernent la mobilisation de tous les acteurs pour une prise en charge effective des victimes; l'accélération des procédures d'indemnisation; et l'appropriation par l’État des engagements pris dans le domaine de la justice réparatrice.
L'événement revêt une importance politique et sociale particulière, car il intervient alors que le pays est toujours confronté aux séquelles de décennies de conflits et d'impunité. L'ANVC a rappelé que la loi n° 22/065 du 26 décembre 2022 instituant le Fonds national des réparations des victimes (FONAREV) constitue une avancée législative majeure.
Cependant, l’Association a vivement souligné que la vulgarisation, l'appropriation et la mise en œuvre concrètes du FONAREV restent incomplètes. La reconnaissance du « génocide congolais » et l'examen des procédures jurisprudentielles montrent que la cause des victimes est désormais un enjeu qui ne peut plus être ignoré.
En conclusion, l’ANVC a lancé un appel vibrant aux pouvoirs publics et aux partenaires internationaux pour un engagement sans faille notamment, mettre en œuvre un plan national de réparation non pas seulement indicatif, mais pleinement opérationnel et financé; assurer la participation effective des victimes dans les instances de décision, de suivi et d’évaluation; renforcer la sensibilisation pour l'identification, l'enregistrement et l'assistance de chaque victime; et promouvoir la reconnaissance politique et morale des souffrances subies, perçue comme un levier de cohésion nationale et de réconciliation.
Pour les responsables de l’ANVC, la reconnaissance des victimes est une condition sine qua non pour l'établissement d'une société juste et équitable. Le véritable défi, au-delà de la parole libérée, réside désormais dans l'implémentation durable des engagements annoncés, avec un calendrier connu et des indicateurs de performance vérifiables pour que les victimes puissent enfin bénéficier d'indemnisation, d'assistance sociale, de réinsertion économique et d'une justice réparatrice.
Félix Mulumba



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